ALINA LEDEANU Paul Valéry et ses amis roumains

Il y a dix huit ans, Secolul 20 proposait à ses lecteurs roumains et étrangers deux textes événiments publiés dans un numéro „Spécial Valéry” (7-12/1995) grâce au généreux appui des ayants droit du grand écrivain.
La valeur exceptionnelle de ces textes, intrinsèque d’abord, réside aussi dans le fait qu’ils comptent parmi les derniers écrits valéryens. Pour les Roumains, en plus, ces documents acquièrent une valeur à part, les textes en question leur étant adressés.
J’ai découvert moi-même le premier document, un manuscrit jusqu’à ce moment-là encore inédit, dans les „Derniers textes – 1944-1945” du fonds „Valéry” à la Bibliothèque Nationale de France (4228 Valéry 73 R. 72014) et, au début, j’ai en du mal à préciser la date et les circonstances exactes de la création.
Le fac-similé du second a déjà été publié par la revue Création (Nr. XI, juin 1977) dont la directrice Marie-Jeanne Durry considère ces pages de Valéry comme „les dernières de sa vie (peut-être les avant-dernières)” et dont Pierre Andreu – qui les avait sauvées „par miracle” – en raconte l’histoire:
„Il (ce texte) avait été demandé à Paul Valéry par Ilarie Voronca, qui dirigeait la section roumaine des Emissions vers l’étranger de ce qui s’appelait alors la Radiodiffusion française (…)
Le 1er janvier 1945, nous commençâmes à émettre et, malgré la guerre qui continuait, nous nous étions déjà fixé pour but de faire connaître à nos amis étrangers les meilleures productions de l’esprit français. C’est ainsi que Voronca, – poète dont nous ne savions pas que la vie était si menacée – s’était adressé, dans les derniers jours d’avril 1945, à Paul Valéry pour lui demander une chronique sur la renaissance de la liberté. Cette chronique avait-elle été enregistrée? Je le suppose, et nous nous trouvons, sans doute, devant une transcription assez grossière de cet enregistrement, remise à Paul Valéry pour qu’il puisse la corriger avant qu’elle n’aille aux archives. Ces corrections sont importantes; ne serait-ce que celle – de sa main malade – où aggravant le regard pessimiste de 1917, il écrivait, en avril 1945, deux semaines avant la fin joyeuse de la guerre: „Je crains pour l-avenir de la culture”.
J’ai ramassée cette chronique au millieu de papiers, abandonnés dans un couloir, pour être descendus aux ordures. Ce jour-là, jour de déménagement hasardeux, j’ai sauvé ce que j’ai pu (…)”
J’avais insisté dès la première publication des deux textes dans Secolul 20, sur le fait qu’à ma connaissance, les deux documents n’avaient jamais été étudiés en correlation, malgré les dates évidemment proches de leur elaboration, leur destinataire commun (“Les amis Roumains connus ou incounnus”), malgré l’empreite indélébile du style oral caractérisant les deux (“Je voudrais dire quelques mots”, “et ne parlons pas”, etc.)
Je suis toujours persuade qu’il faut regarder ces deux manuscrits non pas comme deux productions différentes, mais plutôt comme les deux étapes d’une seule; l’inédit ci-joint ne serait donc que le brouillon du texte que Paul Valéry allait lire à la radio. Hypothese que mériterait elle-même une recherché appliqué, vu la double portée qu’elle implique: celle liée à la genèse d’un texte valéryen tout comme celle concernant les relations de Paul Valéry avec la Roumanie.
Reprendre leur publication dans ce numéro de notre revue c’est mettre l’accent sut oute une problématique européenne qui nous paraît mieux mise en valeur paar la reproduction d’un fragment de l’essai de François Valéry – fils cadet de l’écrivain et comptant lui-même parmi les artisans de la Grande Europe.

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